L’exposition “Mascara·des !” au Pavillon d’exposition temporaire, cœur battant de La Fondation du doute de Blois

La Fondation du doute de Blois, riche du seul parcours permanent en France et l’un des plus importants d’Europe consacré à Fluxus, ouvre une nouvelle exposition temporaire, Mascara·des !, dans son Pavillon d’exposition temporaire. Elle s’installe dans un site architectural aux époques bien visibles accueillant le Conservatoire de musique-théâtre de la ville, son école d’art, et La Fondation du doute. Son directeur, Gilles Rion, nous partage les visions scénographiques de sa nouvelle exposition et tisse des liens avec les espaces qui accueillent la Collection permanente dont il a hérité à son arrivée.

Vue générale de la Cour du doute – Photo © La Fondation du doute – Ville de Blois

Quel est le principe de l’exposition Mascara·des ! que vous présentez au Pavillon d’exposition de La Fondation du Doute ?

Gilles Rion : C’est la troisième exposition que je présente depuis que je suis arrivé en septembre 2023. Celle-ci n’est pas aussi collective que la première, Critique de la ville quotidienne, pas aussi monographique que la dernière, consacrée à Benoit Huot – Le peuple qui vient, mais c’est une exposition qui réunit un nombre limité d’artistes, autour de la notion de la mascarade, du masque. L’exposition permet aux six artistes de déployer leurs univers dans un espace propre, qui leur serait à chacun.e consacré, tout en permettant le glissement d’un espace à l’autre et donc d’une interprétation à une autre.

Plan de la scénographie – Photo © Gilles Rion

Comment avez-vous conçu l’espace de cette exposition ?

G. R. : Nous avions imaginé, dans le cadre de la scénographie de l’exposition précédente, un système de cimaises dont le cahier des charges était principalement de pouvoir être réutilisable et modulaire. Nous nous sommes inspirés des dimensions de 153 cm x 310 cm d’un panneau de bois contre-plaqué en peuplier industrialisé et avons ensuite inventé la structure qui permet de soutenir ces panneaux droits. Nous avons enfin multiplié cet assemblage par autant de modules que nous voulions dans l’espace.

La majorité de ces modules-bois n’a subi aucun traitement. Ils sont laissés à l’état brut du bois industrialisé. Pourtant, l’imaginaire d’une mascarade pourrait apparaître comme très chargé ?

Meat Artist(1992) de Messieurs Delmotte – Photo DR

G. R. : Initialement, j’avais commencé à discuter avec les artistes de la possibilité d’utiliser des papiers peints sur les murs. En fait, je ne voulais pas recouvrir les panneaux bruts d’une couleur, blanche par exemple ou autre, sans que ce ne soit lié à ce que signifie une exposition. Certains artistes ont demandé à ce que les murs soient repeints en blanc pour des questions de neutralisation du support ; nous l’avons accepté, mais à la demande des artistes. Le parti pris scénographique de cette exposition est de laisser comprendre que ce qui est présenté n’est autre que des éléments rapportés dans le Pavillon. En tant qu’architecture, ce Pavillon fonctionne plus ou moins bien pour un espace d’exposition, mais il possède une architecture très forte dans lequel les éléments doivent laisser entendre qu’ils sont seulement rapportés, qu’ils ne sont là que temporairement, qu’ils ne font pas partie de l’architecture telle qu’elle est imaginée initialement. C’est pour cela que les éléments scénographiques que nous avons rapportés sont en retrait par rapport à la clôture du bâtiment, pour justement se mettre à distance et créer une sorte de dialogue ouvert et explicite avec le bâtiment. Je perçois le Pavillon comme un bâtiment quelque peu brutaliste, les IPN sont tout à fait visibles, nous voyons que le béton plus ou moins bien ciré est visible, la structure même du bâtiment est visible donc c’est aussi pour cela qu’il me semblait que la scénographie devait être elle-même plus brutaliste que brute.

Vue de l’accrochage de Dominique Théâte dans l’exposition Mascara·des ! – Photo © Rémy Ebras

Vue de l’accrochage de la Collection permanente de La Fondation du doute – Photo © Rémy Ebras

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Comment pense-t-on l’éclairage des œuvres dans une architecture donc brute, mais surtout entièrement vitrée ?

G. R. : Ce que je crains le plus c’est lorsqu’il fera grand soleil puisque la lumière naturelle fait très mauvais ménage avec les œuvres, en particulier avec celles que nous aurons là. Des œuvres dont les couleurs et le papier risquent de cramer au contact de la lumière naturelle diurne ou nocturne. Donc la question est plutôt de savoir comment se prémunir de la lumière naturelle, sans pour autant cloisonner ? Dans le cadre de cette exposition, nous allons attendre que tout soit monté. Une partie de l’accrochage est réalisée de façon plus autonome par notre équipe mais nous accueillons également des installations où l’ensemble de l’espace participe à l’œuvre. L’ambiance lumineuse qui sera réalisée participe également à l’œuvre, et donc dépend de la volonté de l’artiste. Nous discuterons avec eux.elles de ce qu’il.elle.s attendent de leurs espaces et nous essaierons de créer une cohérence sur l’ensemble pour ne pas qu’il y ait de télescopages scénographiques qui ne fonctionnent pas, et quand même maintenir une cohérence.

Soulier (2024) d’Aurore-Caroline Marty – Photo DR

Lorsque nous traversons la Collection permanente de la Fondation qui s’inscrit dans un ancien couvent du XIXe siècle, au Pavillon d’exposition temporaire construit dans sa cour, nous sentons que le parti pris muséographique n’est significativement pas le même. Pourquoi ?

G. R. : La différence repose dans la nature de chacune des expositions. L’une se veut permanente et donc doit être capable de durer dans le temps, de dérouler un parcours beaucoup plus long. Celle-ci a aussi une ambition plus pédagogique puisqu’il s’agit de passer au travers d’un certain nombre de chapitres qui donnent à voir par des œuvres, les points communs qu’il pouvait y avoir entre des artistes. Au Pavillon, les expositions se veulent moins pédagogiques mais plutôt manifestes. Ce sont des expositions qui veulent ruer dans les brancards de la bien-pensance politique, culturelle, avec une volonté d’être un petit peu coup de poing. Les textes sont toujours un peu emportés, et puis il y a effectivement des différences dans l’accrochage mais il y a aussi volonté de faire lien. Par exemple, l’effet cabinet de curiosités du deuxième étage de la Collection permanente était important selon moi qu’il se retrouve ici au Pavillon. Ce type d’accrochage là, je le trouve beaucoup plus intéressant parce que le visiteur va forcément faire des connexions de lui-même entre des œuvres qui sont accrochées plus ou moins proches et des connexions qui échappent tout à fait au sens de celui qui accroche, de celui qui pense l’accrochage et de celui qui réalise les œuvres parfois.

Œuvres de Messieurs Delmotte – Photo © Rémy Ebras

Comment envisagez-vous ce Pavillon d’exposition temporaire à l’échelle plus globale de La Fondation du doute dont vous avez la direction ?

G. R. : Le Pavillon d’exposition est le premier espace d’exposition ouvert sur la ville puisque c’est un espace qui se situe au sein du site Franciade. Il est fréquenté quotidiennement par des centaines voire des milliers d’élèves et leurs familles du Conservatoire, élèves de l’école d’art. Donc c’est un espace d’exposition qui est une porte d’entrée vers la création d’aujourd’hui. C’est un espace qui doit d’abord rester ouvert, qui doit aussi rester carte blanche. Actuellement, c’est le seul espace d’exposition temporaire de La Fondation du doute, donc c’est un espace dans lequel on fait tout. Si d’aventure nous avions d’autres espaces d’exposition temporaire qui permettent de répondre au cahier des charges habituel d’une exposition temporaire, il me semble qu’il pourrait devenir à terme un espace d’expérimentations pour des installations, des environnements, des performances et des rencontres à l’échelle de ses 200 m², sur des temps parfois plus courts qu’une exposition temporaire classique.

Œuvres de Charles Fréger – Photo © Rémy Ebras

Vendredi 7 février à 18 h 30, La Fondation du doute rouvre ses portes pour le vernissage de sa nouvelle exposition temporaire, Mascara·des !. Elle sera visible jusqu’au 11 mai 2025.

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