Jeudi 7 novembre, les artistes et technicien.ne.s, intermittent.e.s du spectacle, se réveillent avec quelques vertiges. En effet, les organisations syndicales s’élèvent et appellent à manifester à l’aube d’une proposition de négociation des annexes VIII et X qui voyaient la déliquescence de l’horizon du régime. Vendredi 8 novembre, cette idée n’a pas duré. Analyse de ce frisson avec Ghislain Gauthier, secrétaire général de la FNSAC-CGT.
“Ce régime tiendra, peut-être au prix de grosses luttes mais il tiendra.” Ghislain Gauthier
Comment s’est passée la journée de mobilisation en lien avec la nouvelle séance de négociation sur l’Assurance chômage ?
Ghislain Gauthier : Écoute, c’était une mobilisation un peu express. Il y a eu pas mal de monde. En tout cas à Paris, nous étions environ 500 personnes. Et puis en région, à Marseille ils étaient 200 personnes, et environ 100 personnes à Lyon.
Quel est le contexte de cette mobilisation ?
G. G. : Le gouvernement Michel Barnier a demandé aux partenaires sociaux de reprendre les discussions de l’Assurance chômage en se basant sur l’accord conclut en 2023. Il est demandé de réaliser 400 millions d’économies supplémentaires par rapport à la trajectoire initialement demandée par l’État. Le MEDEF, l’U2P et la CPME entamaient alors avec les cinq confédérations syndicales (CGT-CFDT, FO, CFO et CFTC) des négociations quant à l’Assurance chômage à l’Unédic. Si l’accord de 2023 prévoyait de pérenniser les règles actuelles des annexes VIII et X, le MEDEF a proposé de couper dans les droits des intermittent.e.s en augmentant le nombre d’heures requis pour ouvrir des droits à l’Assurance chômage. Ils demandaient 610 h pour les technicien.ne.s du spectacle et 580 h pour les artistes au lieu des 507 h requises aujourd’hui.
Quel impact cela aurait-il eu du côté des intermittent.e.s ?
G. G. : Si cela était adopté, cela conduisait à sortir près d’un tiers des intermittent.e.s, et plus précisément d’un tiers des technicien.ne.s, et la moitié des artistes du régime. C’est donc énorme, cela constituait une vraie provocation.
Où en est ce projet de négociations aujourd’hui ?
G. G. : Ils ont vite retiré cette idée du texte proposé puisque les cinq centrales syndicales y étaient opposées, et puis il y a eu la mobilisation en parallèle. Cela laisse penser que le MEDEF a posé ça sur la table comme un levier de négociations, dans le cadre de ces 400 millions d’euros d’économies demandées. En disant “nous retirons cette proposition du texte, mais il faudra être plus attentifs à nos demandes”, ils demandent une baisse des cotisations patronales déjà évoquée lors des négociations de 2023. Il était donc important de se mobiliser parce que régulièrement les règles sont remises en question, et nous ne pouvions pas spéculer sur le danger d’une telle proposition.
Les coupes budgétaires que prévoit le Ministère de la Culture dans le budget 2025 auront-elles un impact de ce côté ?
G. G. : Ces coupes n’auront pas d’impacts sur l’Assurance chômage. Toutefois, il y a des sujets à l’Assemblée qui sont très préoccupants et auront des conséquences sur nos professions. D’une part, il y a le projet de loi de finances de la Sécurité sociale qui prévoit de modifier les règles de calcul à la baisse des indemnités journalières maladies/maternité pour tous les salarié.e.s. Les intermittent.e.s vont être impacté.e.s lorsqu’ils.elles seront en arrêt maladie ou maternité parce qu’ils.elles n’ont pas de compléments de salaire de leurs employeurs contrairement aux salarié.e.s en CDI ou CDD. Dans ce type de situation, leurs indemnités journalières se verront tout simplement diminuées.
En tant que jeune intermittent, je ne peux m’empêcher de me demander si nous avons un avenir dans ce régime ?
G. G. : Ce régime tiendra, peut-être au prix de grosses luttes mais il tiendra. La situation dans laquelle les jeunes arrivent dans le marché du travail en ce moment est très préoccupante, je n’ai jamais vu cela en dix ans. Si nous enchaînions les crises, comme la COVID-19, là nous observons manifestement un retrait des financements publics alors que de l’autre côté nous constatons une augmentation du nombre d’intermittent.e.s. Durant cette période, il faut surtout continuer à se former et saisir les opportunités là où elles se présentent.